Camille Noûs, la communication scientifique et le régime d’auctorialité

Alors que la pratique scientifique est foncièrement collective, communiquer en science s’accompagne d’une image contraire, plaçant l’individu « auteur » au centre du tableau. La norme actuelle des signatures multiples ne remet pas en cause cet individualisme : à bien des égards, elle l’exacerbe. Cette situation est le résultat d’évolutions constantes du monde académique et de l’édition scientifique. Si au fil des siècles, en sciences comme en arts, le régime d’auctorialité a pu être interrogé tandis que s’ouvraient des espaces permettant de le repenser, les injonctions toujours plus contraignantes produites par un néolibéralisme dominant viennent au contraire le renforcer. L’irruption d’une allégorie comme Camille Noûs, qui émane des rangs mêmes de la communauté académique, s’inscrit en contrepoint de ce régime dominant. Elle donne matière à reconsidérer la fonction-auteur bien au-delà du terrain étriqué dans lequel l’enferme le prestige convertissable en valeur monétaire. L’article propose d’analyser la démarche de Camille Noûs comme une volonté ferme de ranimer l’éthos propre à l’activité des scientifiques, pour en prendre soin et conserver ainsi son intégrité.